Réouvrir la question

Bruce C. Murray: Science, pp. 688-689, août 1972

The UFO Experience. A Scientific Inquiry. J. Allen Hynek, Regnery, Chicago, 1972. xii, 276 pp. + plates. $6.95.

S'il y a une chose plus difficile que d'écrire un livre responsable sur les Objets Volants Non Identifiés, c'est d'écrire une critique significative d'un tel livre sans tomber dans la controverse. J'ai le sentiment malaisé que Hynek a plus réussi dans cette tâche que je le serai dans le mien. Le livre de Hynek est plus qu'une simple tentative de justifier l'intérêt scientifique pour les phénomènes d'ovnis. Il est, en fait, la version de Hynek de ce que le rapport Condon s1Scientific Study of Unidentified Flying Objects. Menée par l'Université du Colorado sous contrat avec l'United States Air Force. Edward U. Condon, Directeur scientifique. Daniel S. Gillmor, Ed. Publié en association avec Colorado Associated University Press par Dutton et en tant que New York Times Book par bantam, 1969. aurait dû être, entrelacé d'une critique piquante de l'étude sur laquelle il a rapporté. Cette étude fut soutenue par l'Air Force et formellement examinée et approuvée par l'Académie Nationale des Sciences. Ainsi Hynek ne défend pas seulement les ovnis mais attaque nécessairement l'établissement scientifique qui les a mis de côté. Nos institutions scientifiques modernes pourraient-elles être aussi limitées que l'ont été leurs prédécesseurs lorsque l'autorité scientifique a refusé d'accepter la réalité des météorites, de l'hypnose, de la dérive des continents, des germes, de Troie, d'Atlantis et de l'Homme du Pleisocene ? Ou les ovnis appartiennent-ils vraiment au domaine de la non-réalité auquel la science affecte les fantômes, miracles religieux, l'astrologie, les dragons, l'ESP, l'abominable homme des neiges et les monstres du Loch Ness ?

Hynek, qui est président du Département d'Astronomie de l'Université Northwestern et directeur de son Centre de Recherche Astronomique Lindheimer, est un enquêteur crédible. Pendant 20 ans il a été consultant en astronomie pour le "Projet Blue Book" de U.S. Air Force chargé de l'enquête formelle sur les signalements d'ovnis. Cette activité fut achevée fin 1969, vraisemblablement en réponse à la déclaration de Condon (1),

Une considération attentive des éléments répertoriés tels qu'ils nous sont accessibles nous amène à conclure qu'une étude plus étendue des ovnis ne peut probablement pas être justifiée dans l'attente que la science en soit avancée.

De plus, jusqu'il y a peu de temps Hynek avait généralement évité de publier ses propres points de vue sur la compétence et l'objectivité de Condon concernant les ovnis. Ainsi il mérite une écoute de ses pairs scientifiques. Heureusement pour nous, le livre est bien organisé et très facile à lire, étant destiné à un public à la fois populaire et technique. Une distraction mineure est la rigidité didactique ? presque théologique ? filtrant dans ses arguments concernant ce qui est et ce qui n'est pas scientifique. Un eccueil similaire caractérise des parties du rapport Condon et est, peut-être, inévitable dans tout discours concernant Foi, Morale et Hérésie, scientifiques ou autres.

Hynek définit un ovni non seulement comme un objet ou une lumière vu dans le ciel (ou au sol) dont l'apparence et le comportement mystifie ses observateurs mais comme un qui reste non identifié après un examen rapproché de l'ensemble des éléments disponibles par des personnes techniquement capables de faire une identification de sens courant si une est possible.

Ainsi les ovnis de Hynek sont, par définition, incompréhensibles pour un théoricien et tout aussi frustrants pour un observationnaliste. Pas la peine de se demander pourquoi le sujet a été largement ignoré par la communauté scientifique. Cependant des inconvénients semblables se sont appliqués dans le passé à l'étude de la foudre en boule, les aurores boréales, le coelacanthe, la psychologie freudienne et les cratères d'impact, par exemple. La vertue de la définition de Hynek est que de tels ovnis sont effectivement intéressants scientifiquement. La question principale devient alors de savoir si un quelconque des milliers de signalements d'ovnis peut remplir les critères de Hynek et éventuellement constituer d'authentiques nouvelles observations empiriques.

Condon, d'un autre côté, choisit de définir un ovni comme le stimulus d'un signalement fait par un ou plusieurs individus de quelque chose vu dans le ciel (ou un objet pensé être capable de vol, mais vu lorsque posé à Terre)

qui a intrigué l'observateur suffisamment pour qu'il le signale. L'ovni de Condon est le signalement d'ovni de Hynek et inclut ainsi une vaste population de méprises inintéressantes avec des étoiles, planètes, avions, ballons et ainsi de suite, et tout aussi bien des canulars occasionnels. Dans un tel welter toute authentiques nouvelles observations empiriques serait significativement diluée et plus difficile à reconnaître. Les ovnis de Condon sont dominés par ce qui peut être rejeté par l'explication, tandis que ceux de Hynek sont limités à ce qui ne le peut pas.

De manière intéressante, Hynek et Condon s'accordent sur le fait que ceux signalant des ovnis sont généralement des citoyens sérieux et sobres étant authentiquement intrigués par ce qu'ils ont observé. Et il s'accordent sur le fait que la grande majorité des ovnis ne sont tout simplement pas signalés par peur du ridicule ou autres raisons. Les 2 études concluent également que le motif des signalements d'ovnis est similaire dans le monde entier.

L'aspect le plus controversé de l'approche de Condon, et l'objet de la critique la plus aiguë de Hynek, a été la décision d'évaluer les signalements d'ovnis principalement pour savoir s'ils constituaient ou non une preuve de visite extraterrestre sur Terre. Condon, en effet, adopte la position que soit les soucoupes volantes (et les petits hommes verts) peuvent être prouvées, soit les ovnis ne sont pas intéressants à étudier ! Une telle approche semblerait inévitablement destinée à déboucher sur un résultat négatif sans signification, obscurcissant peut-être des phénomènes physiques non reconnus et vraiment intéressants. Il est concevable que la définition des ovnis de Condon et son utilisation de la visite extraterrestre comme critère sérieux de significativité aient plus reflété un désir (inconscient) de faire s'évanouir complètement le problème ovni de la jurisdiction scientifique qu'une tentative réfléchie d'isoler de possible authentiques nouvelles observations empiriques.

Mais même si l'étude Condon est aussi superficielle et non pertinente que Hynek l'affirme, la véritable question reste : Y a-t-il suffisamment de preuves de phénomènes véritablement inexpliqués au sein de tous les signalements d'ovnis pour garantir une étude continue sérieuse ? L'approche de Hynek est de présenter une sélection de 80 cas d'ovnis, impliquant tous plus d'un seul observateur et certains impliquant des observations simultanées et indépendantes. La plupart des signalements de cas incluent des interviews intensives par Hynek lui-même. Les cas de Hynek sont principalement tirés des dossiers du projet Blue Book et ne recouvrent que légèrement les 90 cas ou à peu près discutés dans le rapport Condon. L'étude Condon n'a pas beaucoup insisté sur les cas antérieurs et s'est concentrée de manière générale sur les "frais" qui eurent lieu au cours de l'étude (1967-1968). Les quelques cas qui se recoupent n'ont pas été "expliqués" dans le rapport Condon. En fait, selon Hynek, près de 1/4 des cas sélectionnés par Condon reste inexpliqué, un fait a priori significatif non souligné par Condon.

Hynek divise ses 80 cas en 6 classes observationnelles : Disques Diurnes, Lumières Nocturnes, Radar-Visuel et Rencontres Rapprochées du 1er, 2nd et 3ᵉ type. Les 2 premières catégories sont virtuellement auto-descriptives. Hynek insiste sur la similarité dans les détails des nombreuses observations, comme l'absence de bang sonique en dépit de la grande vitesse observée. Les signalements Radar-visuels, souvent générés par du personnel d'aéroport formé ayant simultanément fait des observations radar et visuelles, sembleraient être difficile à écarter seulement comme des phénomènes de propagation radar anormale. L'un dans l'autre, cela ne contraint pas intolérablement l'imagination physique de quelqu'un de penser que les 3 premières classes sont potentiellement compréhensibles.

D'un autre côté, les Rencontres Rapprochées, dans lesquelles un objet volant semblable à une soucoupe est décrit comme ayant été observé de près, sont évidemment plutôt difficiles à accepter comme tels. Hynek reconnapit implicitement cet écart de crédibilité croissante par sa subdivision en 3. Les Rencontres Rapprochées du 1er type impliquent l'observation signalée d'un objet à une portée de peut-être 20 à 500 pieds. Dans les Rencontres Rapprochées du 2ᵉ type l'observateur aurait perçu une manifestation physique de la présence de l'objet ; l'interférence avec l'allumage et les phares d'auto est listée comme un effet courant, mais des effets thermiques et physiologiques sont également rapportés. Finalement, dans les Rencontres Rapprochées du 3ᵉ type des figures humanoïdes sont également rapportées. Hynek trace la ligne à ce point, indiquant que les signalements additionnels dans lesquels une communication effective avec ces humanoïdes est prétendue viennent généralement d'individus manifestant des aberrations psychologiques (contrairement à la grande préponderance de ceux signalant les catégories d'ovnis les moins bizarres). En fait, Hynek se sent à l'évidence mal à l'aise quant à inclure les Rencontres Rapprochées du 3ᵉ type à cause des implications de petits hommes verts.

Cependant, c'est justement là que les faiblesses de la propre approche de Hynek deviennent évidentes. Tout type de Rencontre Rapprochée est bizarre - alors pourquoi exclure seulement les plus bizarres ? Hynek a-t-il peur de l'implication apparente de sa propre analyse - en clair que tous les phénomènes d'ovnis pourraient être liés aux Rencontres Rapprochées, et peut-être aux soucoupes volantes et petits hommes verts ? De fait, il semblerait que cette implication staggering ait amené feu James McDonald de l'Université d'Arizona à croire effectivement à une visite extraterrestre, sorte de réponse moderne du thême de la vie intelligente sur Mars de Percival Lowell. Hynek de traite pas de manière adéquate la question cruciale de how homogeneous a population the phenomena under discussion really are, et là pourrait résider sa plus grande vulnerabilité. Peut-être au fil des décennies de sa préoccupation des ovnis est-t-il devenu victime de la tendance naturelle d'un scientifique à imputer l'unité à son sujet, même si la nature n'est en fait pas si simple. Cependant, Hynek reste un empiriste dévoué, malgré son inconfort au sujet des Rencontres Rapprochées, et maintient que l'existence de nouvelles observations empiriques est de fait fortement suggéré par le recueil de rapports d'ovnis enquêtés en profondeur mais toujours inexpliqués. Sa plaidoirie est en conséquence pour une une respectabilité scientifique suffisante pour le sujet des ovnis afin de permettre que des fonds de recherche fédéraux modestes lui soient attribués et que de nouvelles données soient recueillies sans peur du ridicule.

A décharge, la défense de Hynek sur les ovnis en tant que sujet scientifique valide, si spéculatif, est plus crédible que la tentative de Condon de faire comme s'ils n'existaient pas. Le fait que Hynek n'ait reçu absolument aucun soutien de la NASA ou de la NSF pour l'étude des ovnis peut être considéré comme un symptome plutôt dismal de la structure autoritaire de la science établie. Il est aussi décevant que la Science, qui a gagné le respect des scientifiques américains et occasionellement l'inamitié des bureaucrates américians en fournissant un forum independant aux points de vues controversés, ait échoué à publier une réfutation responsable du rapport Condon, la traitant à la place comme un élément d'actualité. En conséquence, les critiques substantielles soulevées par Hynek maintenant n'ont pas été entendues de manière adéquate. Ainsi, depuis ce point de vue de juré au moins, Hynek a gagné un sursis pour les ovnis avec ses nombreuses pages de rapports provocates de rapports inexpliqués et son articulate défi à ses collègues de tolérer l'étude de quelque chose qu'ils ne peuvent comprendre.

Bruce C. Murray, Division des Sciences Géologiques et Planétaires, Institut de Technologie de Californie, Pasadena.