Le rapport Condon laissa beaucoup d'ufologues insatisfaits, qui l'ont considéré comme une dissimulation des activités de la CIA dans la recherche sur les ovnis. De nouvelles observations au début des années 1970s ont alimenté des croyances selon lesquelles la CIA était impliquée d'une certaine façon dans une vaste conspiration. Le le , William H. Spaulding, chef d'un petit groupe ovni, le GSW, écrivit à la CIA pour obtenir une copie du rapport de la commission Robertson et tous les documents relatifs aux ovnis. Spaulding était convaincu que l'Agence retenait des dossiers importants sur les ovnis. Les officiels de l'Agence fournirent à Spaulding une copie du rapport de la commission Robertson et du rapport Durant s1Klass 1983, p. 8.
le , Spaulding écrivit à nouveau à l'Agence en mettant en doute l'authenticité des rapports qu'il avait reçus et prétendant que la CIA dissimulait son activité à propos des ovnis. Gene Wilson, le Coordinateur du Secret et de l'Information de la CIA, tenta de répondre de manière satisfaisante à Spaulding, A aucun moment avant la formation de la commission Robertson et subséquemment à l'émission du rapport de la commission, la CIA n'a été engagée dans l'étude du phénomène ovni. Le rapport de la commission Robertson, d'après Wilson, était la somme de l'intérêt de l'Agence et de sa participation dans le domaine des ovnis. Wilson en concluait également qu'il n'y avait pas de documents supplémentaires relatifs aux ovnis en possession de la CIA. Wilson était mal informé s2Wilson, lettre à Spaulding, 26 mars 1976 et GSW v. CIA Civil Action Case 78-859.
en , Spaulding et le GSW, non convaincus par la réponse de Wilson, intentèrent un procès contre l'Agence au nom du Freedom of Information Act, demandant spécifiquement tous les documents sur les ovnis en possession de la CIA. Submergée de demandes similaires du FOIA pour l'information de l'Agence sur les ovnis, les officiels de la CIA consentirent, après de longues manœuvres légales, à mener une recherche raisonnable dans les dossiers de la CIA pour des documents sur les ovnis s3[GSW v. CIA Civil Action Case 78-859, p. 2]. En dépit d'une attitude antipathique de l'ensemble de l'Agence envers la requête, les responsables de l'Agence, menés par Launie Ziebell, du Bureau de Conseil Général, ont mené une recherche consciencieuse des documents liés aux ovnis. Insistant, exigeant, et parfois même menaçant, Ziebell et son groupe ont récuré l'Agence. Ils sont même parvenus à trouver un vieux dossier ovni sous le bureau d'une secrétaire. La recherche produisit finalement 355 documents représentant approximativement 900 pages. Le le , l'Agence les remit tous, sauf 57 documents (environ 100 pages), au GSW. Ces 57 documents furent retenus pour des motifs de sécurité nationale et de protection des sources et des méthodes s4Interview de l'auteur avec Launie Ziebell, 23 juin 1994 et interview de l'auteur avec l'analyste de l'OSI, 21 juillet 1994 Affidavits of George Owens, CIA Information and Privacy Act Coordinator; Karl H. Weber, OSI; Sidney D. Stembridge, Office of Security; et Rutledge P. Hazzard, DS&T s5GSW v. CIA Civil Action Case 78-859 et Sayre Stevens, Deputy Director for National Foreign Assessment, memorandum for Thomas H. White, Assistant for Information, Information Review Committee, "FOIA Litigation Ground Saucer Watch," sans date.
Bien que les documents publiés n'aient pas produit de révélations sensationnelles et n'aient révélé qu'un intérêt mineur de l'Agence pour le phénomène ovni après le rapport de la commission Robertson de 1953, la presse traita cette publication de manière sensationnelle. Le New-York Times, par exemple, déclara que les documents déclassifiés confirmaient un vif intérêt du gouvernement pour les ovnis et l'implication secrète de l'Agence dans la surveillance des ovnis s6"CIA Papers Detail UFO Surveillance," The New York Times, 13 janvier 1979 Patrick Huyghe, "UFO Files: The Untold Story," The New York Times Magazine, 14 octobre 1979, p. 106 s7Jerome Clark, "UFO Update," UFO Report, août 1979. Le GSW intenta alors un procès pour la publication des documents retenus, déclarant que l'Agence détenait encore des informations-clefs s8Jerome Clark, "Latest UFO News Briefs From Around the World," UFO Update, août 1979 s9GSW v. CIA Civil Action No. 78-859. C'était tout à fait semblable à l'affaire des documents sur l'assassinat de Kennedy. Qu'importe le nombre de documents que l'Agence a rendus publics, et qu'importe le manque d'intérêt et l'insignifiance de l'information, les gens continuaient à croire dans une dissimulation et une conspiration de l'Agence.
Le DCI Stansfield Turner fut si bouleversé quand il lut l'article du New-York Times qu'il demanda à ses officiers supérieurs, Nous occupons-nous d'ovni ? Après avoir examiné les registres, Don Wortman, Directeur Adjoint pour l'Administration, rapporta à Turner qu'il n'y avait pas d'effort organisé de l'Agence pour faire des recherches à propos du phénomène ovni, ni d'effort organisé pour collecter des renseignements sur les ovnis depuis les années 1950. Wortman assura à Turner que les registres de l'Agence ne contenaient que des enregistrements de correspondance sporadiques traitant du sujet, y compris différentes sortes de rapports d'observations d'ovnis. Il n'y avait pas de programme de l'Agence pour rassembler activement l'information sur les ovnis, et les documents remis au GSW contenaient peu de suppressions s10Wortman, memorandum for DCI Turner, "Your Question, 'Are we in UFOs ?' Annotated to The New York Times News Release Article," 18 janvier 1979. Ainsi rassuré, Turner avait l'appui du Conseil Général pour un jugement sommaire contre le nouveau procès introduit par le GSW. En Mai 1980, les cours ont écarté le procès, trouvant que l'Agence avait conduit de bonne foi une recherche consciencieuse et adéquate s11GSW v. CIA Civil Action 78-859 s12Klass 1983, pp. 10-12.
Au cours de la fin des années 1970s et des années 1980s, l'Agence continua à maintenir son faible intérêt pour les ovnis et les observations d'ovnis. La plupart des scientifiques écartant alors les rapports de soucoupes volantes en les considérant comme une bizarrerie des années 1950s et 1960s, quelques personnes au sein de l'Agence et de la Communauté du Renseignement portèrent leur intérêt sur l'étude de la parapsychologie et des phénomènes psychiques associés aux observations d'ovnis. Des responsables de la CIA se penchèrent également sur le problème ovni pour déterminer quelles observations d'ovnis pouvaient les instruire sur les avancées soviétiques dans le domaine desé et des missiles, et reconsidérèrent ses aspects de contre-espionnage. Les analystes de l'Agence, de la Division de la Science de la Vie de l'OSI ainsi que l'OSWR consacrèrent officiellement une petite partie de leur temps aux questions touchant aux ovnis. Celles-ci comprenaient les soupçons du contre-espionnage selon lesquels les Soviétiques et le KGB utilisaient des citoyens américains et des groupes ovnis pour obtenir des informations sur les programmes sensibles de développement d'armement américains (tels que l'avion furtif), la vulnérabilité du réseau de défense aérienne américain à la pénétration par des missiles étrangers imitant les ovnis, et les signes d'une technologie soviétique avancée associée à des observations d'ovnis.
La CIA a aussi maintenu la coordination de la Communauté du Renseignement avec d'autres agences concernant leur travail dans les domaines de la parapsychologie, des phénomènes psychiques et des expériences de vision à distance. En général, l'Agence s'en tint à une vue scientifique et conservatrice de ces questions scientifiques non conventionnelles. Il n'y avait pas de projet ovni formel ou officiel au sein de l'Agence dans les années 1980s, et les officiels de l'Agence ont gardé à dessein des dossiers ovnis réduits au minimum pour éviter de créer des enregistrements qui auraient pu égarer le public s'ils avaient été publiés s13John Brennan, note pour Richard Warshaw, Executive Assistant, DCI, "Requested Information on UFOs," 30 septembre 1993 s14Interviews de l'auteur avec l'analyste de l'OSWR, 14 juin 1994 et l'analyste de l'OSI, 21 juillet 1994. n1 Cet auteur n'a trouvé pratiquement aucune documentation sur l'engagement de l'Agence dans les OVNIs dans les années 1980. s15Il y a un Centre Psychique de la DIA et la NSA étudie la parapsychologie, cette branche de la psychologie qui traite de l'étude des phénomènes psychiques comme la voyance, la perception extrasensorielle et la télépathie. La CIA serait aussi membre d'un Incident Response Team chargé d'enquêter sur les atterrissage d'ovnis, si cela devait se produire. Cette équipe ne s'est jamais rencontrée. Le manque de documentation solide de la CIA sur les activités de l'Agence liées aux ovnis dans les années 1980 laissent la question entière quelque peu obscure pour cette période. Beaucoup de littérature ovni se centre pour l'instant sur les contactés et les abductés. s16Voir John Mack, Abduction, Human Encounters with Aliens (New York: Charles Scribner's Sons, 1994) et Howard Blum, Out There (New York: Simon and Schuster, 1990).
Les années 1980s ont également produit des accusations renouvelées selon lesquelles l'Agence détenait encore des documents relatifs à l'incident de Roswell en 1947, durant lequel une soucoupe volante s'était soit-disant écrasée au Nouveau-Mexique, et l'émergence de documents qui auraient révélé l'existence d'une opération de renseignement américaine top-secret, n'ayant à répondre qu'au Président, de recherche et de développement sur les ovnis, à la fin des années 1940s et au début des années 1950s. Les ufologues ont longtemps argué que suite au crash d'une soucoupe volante au Nouveau-Mexique en 1947, le gouvernement récupéra non seulement les débris de la soucoupe écrasée, mais aussi quatre ou cinq corps d'extraterrestres. D'après certains ufologues, le gouvernement resserra la sécurité autour du projet et refusa de divulguer les résultats de son enquête et de ses recherches depuis lors s17Berlitz & Moore 1988 s18Moore 1982 s19Klass 1983, pp. 279-281. En 1994 le membre du congrès Steven Schiff (R-NM) a lancé un appel pour une étude officielle de l'incident de Roswell. Le GAO conduit une enquête séparée sur l'incident. La CIA n'est pas impliquée dans l'enquête. John H. Wright, Information and Privacy Coordinator, lettre à Derek Skreen, 20 septembre; et l'interview avec l'analyste de l'OSWR s20Film Roswell s21Peebles, Watch the Skies, pp. 245-251. en , l'armée de l'air américaine publia un nouveau rapport sur l'incident de Roswell, qui concluait que les débris trouvés au Nouveau-Mexique en 1947 provenaient probablement d'une opération de ballons, top-secret à l'époque, le projet Mogul, conçu pour surveiller l'atmosphère en cherchant à déceler des tests nucléaires soviétiquesss22John Diamond, Air Force Probes 1947 UFO Claim Findings Are Down to Earth, 9 septembre 1994, Associated Press release s23William J. Broad, Wreckage of a `Spaceship': Of This Earth (and U.S.), The New York Times, 18 Septembre 1994, p. 1 s24colonel de l'USAF Richard L. Weaver et 1er lieutenant James McAndrew, The Roswell Report, Fact Versus Fiction in New Mexico Desert (Washington, DC: GPO, 1995).
Vers 1984, une série de documents sont remontés à la surface, dont certains ufologues dirent qu'ils prouvaient que le Président Truman avait créé un comité top-secret en 1947, le Majestic-12, pour sécuriser la récupération de l'épave d'ovni de Roswell et de tout autre ovni qui se serait écrasé en vue d'une étude scientifique, et pour examiner tous les corps d'Aliens retrouvés sur de tels sites. La plupart, pour ne pas dire tous ces documents, se sont révélés être des fabrications. Cependant, la controverse persiste s25Voir Good, Timothy 1987 Moore et Stanton T. Friedman, "Philip Klass and MJ-12: What are the Facts," (Burbank California: Fair-Witness Project, 1988), Publication Number 1290; Philip J. Klass, "New Evidence of MJ-12 Hoax," Skeptical Inquirer, vol. 14 (hiver 1990) s26et Moore, William L. et Jaime Shandera, The MJ-12 Documents: An Analytical Report (Burbank, California: Fair-Witness Project, 1990), Publication Number 1500. n2Walter Bedell Smith a soit-disant remplacé Forrestal le 1er août 1950 suite à la mort de Forrestal. Tous les membres inscrits étaient décédés quand les " documents " MJ-12 sont parus en 1984. Voir Peebles, Watch the Skies, pp. 258-268. Le Dr. Larry Bland, éditeur de The George C. Marshall Papers, a découvert que les documents appelés Majestic-12 étaient une fraude complète. Ils utilisaient exactement les mêmes termes contenus dans une lettre de Marshall au candidat à la présidence Thomas Dewey concernant les interceptions "Magic" en 1944. Les dates et noms avaient été changés et "Magic" avait été changé en "Majic." De plus, c'était une photocopie, pas un original. Aucun document original du MJ-12 n'a jamais fait surface. Conversation téléphonique entre l'auteur et Bland, 29 août 1994.
Comme les théories sur la conspiration autour de l'assassinat de JFK, les ovnis ne sont probablement pas près de disparaître, quoi que l'Agence fasse ou dise. La croyance selon laquelle nous ne sommes pas seuls dans l'univers est trop attirante émotionnellement, et la méfiance envers notre gouvernement est trop envahissante pour que la question puisse être amenée sur le terrain des études scientifiques traditionnelles, des explications rationnelles et des preuves.