Les années 1950s : diminution de l'intérêt de la CIA pour les ovnis

Après le rapport de la commission Robertson, les responsables de l'agence mirent toute l'affaire des ovnis de côté. En juin 1953, Chadwell transféra la responsabilité en chef de la surveillance des ovnis à la Division de Physique et d'Electronique de l'OSI, tandis que la Division des Sciences Appliquées continuait à fournir tout soutien nécessaire s1Memorandum de Chadwell pour le Directeur de la Division Physique et Electronique de l'OSI (Todos M. Odarenko), Unidentified Flying Objects, 27 mai 1953. Todos M. Odarenko, le chef de la Division de Physique et d'Électronique, ne voulait pas se charger du problème, arguant que cela requerrait trop d'heures de bureau et d'analyse pour sa division. Au vu des conclusions de la commission Robertson, il proposa de considérer le projet comme "inactif", et de ne consacrer qu'un analyste à temps partiel et un employé au classement pour maintenir un dossier de référence des activités de l'USAF et des autres agences sur les ovnis. Ni la Navy, ni l'Armée ne montraient de grands intérêts pour les ovnis, d'après Odarenko s2Memorandum Odarenko à Chadwell, Unidentified Flying Objects, 3 juillet 1953 s3Memorandum de Odarenko à Chadwell, Current Status of Unidentified Flying Objects (UFOB) Project, 17 d écembre 1953.

Odarenko, qui ne croyait pas aux ovnis, chercha à faire relever sa division de la responsabilité du contrôle des rapports d'ovnis. En 1955, par exemple, il recommanda que la totalité du projet soit close, parce qu'aucune nouvelle information concernant les ovnis n'était apparue. Par ailleurs, arguait-il, sa division devait faire face à une sérieuse réduction budgétaire et ne pouvait pas épargner ses ressources s4Memorandum de Odarenko Unidentified Flying Objects, 8 août 1955. Chadwell et d'autres responsables de l'agence, néanmoins, continuaient à s'inquiéter à propos des ovnis. Des rapports d'outre-mer faisant état d'observations d'ovnis, ainsi que des prétentions selon lesquelles des ingénieurs allemands détenus par les Soviétiques étaient en train de développer une "soucoupe volante" en tant que future arme de guerre, retenaient particulièrement leur attention s5Rapport du FBIS, Military Unconventional Aircraft, 18 août 1953 s6Rapports variés, Military-Air, Unconventional Aircraft, 1953, 1954, 1955.

Pour la plupart des dirigeants politiques et militaires des Etats-Unis, l'Union soviétique était devenue, au milieu des années 1950s, un dangereux adversaire. Les progrès des Soviétiques en matière d'armes nucléaires et de missiles guidés étaient particulièrement alarmants. Pendant l'été de 1949, l'URSS avait fait sauter sa première bombe atomique. En Août 1953, 9 mois seulement après que les Etats-Unis eurent testé une bombe à hydrogène, les Soviétiques en faisaient sauter une. Au Printemps 1953, une étude top-secret de la RAND Corporation mettait également en évidence la vulnérabilité des bases du SAC à une attaque surprise par les bombardiers soviétiques à longue portée. L'inquiétude quant au danger d'une attaque soviétique sur les Etats-Unis continuait de croître et les observations d'ovnis ajoutaient au malaise des politiciens US.

Une augmentation des rapports d'ovnis sur l'Europe de l'Est et l'Afghanistan éveillèrent aussi des soupçons sur un progrès rapide des Soviétiques dans ce domaine. Les responsables de la CIA savaient que les Britanniques et les Canadiens expérimentaient déjà des "soucoupes volantes". Le Projet Y était une opération de développement canado-britannico-US pour produire un appareil non-conventionnel de type soucoupe volante, et les responsables de l'agence craignaient que les Soviétiques expérimentent un engin semblable n1Développé par la filiale canadienne de Britain's Ltd, le Projet Y a produit un modèle réduit qui planait à quelques pieds au-dessus du sol s7Note de Odarenko à Chadwell, Flying Saucer Type of Planes, 25 mai 1954 s8Frederic C.E. Oder, Note à Odarenko, USAF Project Y, 21 Mai 1954 s9Odarenko, T. M. Nordbeck, Ops/ SI, et Sidney Graybeal, ASD/ SI, note pour le dossier, Intelligence Responsibilities for Non-Conventional Types of Air Vehicles, 14 Juin 1954.

L'observation d'une soucoupe volante par le sénateur américain Richard Russell et sa suite alors qu'ils voyageaient en URSS par le train, en octobre 1955, ajouta à l'inquiétude. Après avoir longuement interrogé Russell et ses accompagnants, cependant, les officiels de la CIA conclurent que l'observation de Russell n'apportait pas de soutien à la théorie selon laquelle les Soviétiques avaient développé un appareil volant non conventionnel ou ressemblant à une soucoupe. Herbert Scoville Junior, le Directeur Adjoint de l'OSI, écrivit que les objets observés étaient probablement des jets ordinaires montant en chandelle s10Memorandum de Reuben Efron, Observation of Flying Object Near Baku, 13 Octobre 1955 s11Scoville, memorandum pour archive, Interview with Senator Richard B. Russell, 27 Octobre 1955 s12Wilton E. Lexow, Memorandum pour information, Reported Sighting of Unconventional Aircraft, 19 octobre 1955.

Wilton E. Lexow, chef de la Division des Sciences Appliquées de la CIA, était également sceptique. Il posa la question de savoir pourquoi les Soviétiques continuaient de développer des avions de type conventionnel s'ils avaient une "soucoupe volante" s13Lexow, memorandum pour information, Reported Sighting of Unconventional Aircraft, 19 Octobre 1955 s14Frank C. Bolser, memorandum pour George C. Miller, Directeur Adjoint, SAD/SI, Possible Soviet Flying Saucers, Check On s15Lexow, memorandum, Possible Soviet Flying Saucers, Follow Up On, 17 décembre 1954 s16Lexow, memorandum, Possible Soviet Flying Saucers, 1er décembre 1954 s17A. H. Sullivan, Jr., memorandum, Possible Soviet Flying Saucers, 24 Novembre 1954. Scoville demanda à Lexow d'assumer la responsabilité de déterminer les capacités et les limites d'un appareil non-conventionnel, et de tenir à jour le dossier central de l'OSI sur le sujet des ovnis.

L'U-2 et l'OXCART de la CIA en tant qu'ovnis

En novembre 1954, la CIA était entrée dans le monde de la haute technologie avec son projet de reconnaissance verticale U-2. Travaillant avec les installations de Développement Avancé de Lookheed à Burbank, Californie, connues sous le nom de Skunk Works, et Kelly Johnson, un éminent ingénieur aéronautique, l'Agence testa un avion expérimental à haute altitude, l'U-2, en août 1955. Il pouvait voler à 20000 mètres; au milieu des années 1950s, la plupart des avions de ligne commerciaux volaient entre 3500 et 7000 mètres. Par conséquent, quand l'U-2 eut commencé ses vols d'essai, les pilotes commerciaux et les contrôleurs du trafic aérien se mirent à faire des rapports plus nombreux d'observations d'ovnis s18Gregory W. Pedlow ets Donald E. Welzenbach, The Central Intelligence Agency and Overhead Reconnaissance: The U-2 and OXCART Programs, 1954-1974 (Washington, DC: CIA History Staff, 1992), pp. 72-73. (U)

Les premiers U-2 étaient argentés (ils furent peints en noir par la suite) et ils reflétaient les rayons du soleil, particulièrement au lever et au coucher de celui-ci. Ils apparaissaient souvent comme des objets enflammés aux observateurs placés plus bas. Les enquêteurs du projet Blue Book de l'USAF, connaissant les vols de l'appareil secret U-2, tentaient d'expliquer de telles observations en les liant à des phénomènes naturels tels que des cristaux de glace ou des inversions de température. En vérifiant avec l'équipe du Projet U-2 de l'Agence à Washington, les enquêteurs de Blue Book furent en mesure d'attribuer de nombreuses observations d'ovnis aux vols de l'U-2. Ils prenaient garde, cependant, de ne pas révéler la véritable cause de l'observation au public.

Selon des estimations ultérieures des responsables de la CIA qui travaillèrent sur les projets U-2 et OXCART (SR-71, ou Blackbird), plus de la moitié de l'ensemble des rapports d'ovnis de la fin des années 1950s jusqu'aux années 1960s furent attribuées à des vols de reconnaissance pilotés (c'est-à-dire de l'U-2) au-dessus des Etats-Unis s19Pedlow et Welzenbach, Overhead Reconnaissance, pp. 72-73 n2Ceci a également été confirmé dans une interview téléphonique entre l'auteur et John Parongosky, le mardi 26 juillet 1994. Parongosky supervisait au-jour-le-jour le programme OXCART. Ceci conduisit l'USAF à faire des déclarations trompeuses et mensongères au public afin d'apaiser les craintes du public et pour protéger un projet extrêmement sensible au niveau de la sécurité nationale. Bien qu'ils fussent justifiés, ces mensonges alimentèrent par la suite les théories de conspiration et la controverse de la dissimulation des années 1970s. Le pourcentage de ce que l'USAF considérait comme des observations d'ovnis inexplicables tomba à 5,9 % en 1955, et à 4 % en 1956 s20Jacobs 1975, p. 135.

Dans le même temps, la pression augmentait pour obtenir la publication du rapport de la commission Robertson sur les ovnis. En 1956, Edward Ruppelt, ancien directeur du projet Blue Book de l'USAF, révéla publiquement l'existence de la commission. Un best-seller de l'ufologue Donald Keyhoe, un major des Marines à la retraite, plaidait en faveur de la publication de toute l'information sur les ovnis détenue par le gouvernement. Les groupes de recherche privés, tels le NICAP et l'APRO s'empressèrent de faire pression pour la publication de la commission Robertson s21Peebles, Watch the Skies, pp. 128-146 s22Ruppelt, The Report on Unidentified Flying Objects (New York: Doubleday, 1956) s23Keyhoe, The Flying Saucer Conspiracy (New York: Holt, 1955) Jacobs 1975, pp. 347-49]. Sous la pression, l'USAF approcha la CIA afin d'obtenir la permission de déclassifier et publier le rapport. En dépit des pressions, Philip Strong, le Directeur Assistant Adjoint de l'OSI, refusa de déclasser le rapport et évita de révéler le soutien de la CIA à la commission. Comme alternative, l'Agence prépara une version asseptisée du rapport, expurgée de toute référence à la CIA, ainsi que de toute mention d'un quelconque potentiel de guerre psychologique dans la controverse à propos des ovnis s24Strong, lettre à Lloyd W. Berkner s25Strong, lettre à Thorton Page s26Strong, lettre à Robertson s27Strong, lettre à Samuel Goudsmit s28Strong, lettre à Luis Alvarez, 20 décembre 1957 s29Strong, memorandum pour le Major James F. Byrne, Assistant Chief of Staff, Intelligence Department of the Air Force, Declassification of the 'Report of the Scientific Panel on Unidentified Flying Objects', 20 décembre 1957 s30Berkner, lettre à Strong, 20 Novembre 1957 s31Page, lettre à Strong, 4 décembre 1957 s32Les membres de la commission étaient aussi peu disposés à voir révéler leur association avec l'Agence.

Les réclamations pour plus d'information gouvernementale au sujet des ovnis, cependant, ne tarirent point. Le 8 mars 1958, Keyhoe, dans une interview avec Mike Wallace, de CBS, prétendit que la CIA était profondément engagée dans les ovnis, et que l'Agence avait financé la commission Robertson. Ceci provoqua une série de lettres à l'Agence, de Keyhoe et du Dr Leon Davidson, un ingénieur chimiste et ufologue. Ils réclamaient la publication du rapport de la commission Robertson dans son intégralité et la confirmation de l'engagement de la CIA dans la question des ovnis. Davidson s'était convaincu que l'Agence, et non l'USAF, portait la plus grande responsabilité pour l'analyse des ovnis, et que les activités du gouvernement des États-Unis étaient responsables des observations d'ovnis de la dernière décennie. Évidemment, en raison des vols toujours secrets des U-2 et Oxcart, Davidson était plus près de la vérité qu'il ne le soupçonnait. La CIA, néanmoins, se tint fermement à sa politique consistant à ne pas révéler son rôle dans les enquêtes sur les ovnis et refusa de déclassifier l'intégralité du rapport de la commission Robertson s33Wilton E. Lexow, memorandum pour archive, Comments on Letters Dealing with Unidentified Flying Objects, 4 Avril 1958 s34J. S. Earman, lettre au Major Lawrence J. Tacker, Office of the Secretary of the Air Force, Information Service, 4 Avril 1958 s35Davidson, lettre à Berkner, 8 avril 1958 s36Berkner, lettre à Davidson, 18 avril 1958 s37Berkner, lettre à Strong, 21 Avril 1958 s38Davidson, lettre à Tacker, 27 avril 1958 s39Davidson, lettre à Allen Dulles, 27 avril 1958 s40Ruppelt, lettre à Davidson, 7 mai 1958 s41Strong, lettre à Berkner, 8 mai 1958 s42Davidson, lettre à Berkner, 8 Mai 1958 s43Davidson, lettre à Earman, 16 mai 1958 s44Davidson, lettre à Goudsmit, 18 mai 1958 s45Davidson, lettre à Page, 18 mai 1958 s46Tacker, lettre à Davidson, 20 Mai 1958.

Lors d'une réunion avec des représentants de l'USAF pour discuter de la façon dont de futures demandes comme celles de Keyhoe et de Davidson devaient être traitées, les responsables de l'Agence confirmèrent leur opposition à la déclassification du rapport complet et exprimèrent la crainte que Keyhoe n'ait l'oreille de l'ancien DCI VAdm. Roscoe Hillenkoetter, qui était membre du conseil des gouverneurs du NICAP. Ils débattirent la question de savoir s'il fallait que le Général Conseil de la CIA Lawrence R. Houston montre le rapport à Hillenkoetter, pour se sortir de la situation. L'officier de la CIA Frank Chapin laissa aussi entendre que Davidson pourrait avoir des motifs ultérieurs, certains d'entre eux n'étant peut-être pas dans le meilleur intérêt de ce pays, et suggéra d'amener le FBI à enquêter s47Memorandum de Lexow pour Chapin, 28 Juillet 1958. Bien que le dossier soit peu clair sur la question de savoir si le FBI entreprit jamais une enquête sur Davidson ou sur Keyhoe, ou si Houston rencontra une fois Hillenkoetter à propos du rapport Robertson, Hillenkoetter démissionna du NICAP en 1962 s48Good 1987, pp. 346-47 s49Lexow, memorandum pour enregistrement, Meeting with the Air Force Personnel Concerning Scientific Advisory Panel Report on Unidentified Flying Objects, dated 17 January 1953 (S), 16 Mai 1958 s50La Rae L. Teel, Directeur Adjoint de Division, ASD, memorandum pour archive, Meeting with Mr. Chapin on Replying to Leon Davidson's UFO Letter and Subsequent Telephone Conversation with Major Thacker, [sic]", 22 Mai 1958.

L'Agence fut aussi impliquée dans 2 cas d'ovnis assez fameux avec Davidson et Keyhoe dans les années 1950s, ce qui contribua à accroître la méfiance du public envers la CIA concernant les ovnis. On se focalisait sur ce qui avait été rapporté comme étant un enregistrement sonore d'un signal radio provenant d'une soucoupe volante ; l'autre cas présentait ce qui était décrit comme étant des photos d'une soucoupe volante. L'incident du "code radio" commença assez innocemment en l'année d'avant, quand 2 sœurs âgées de Chicago, Mildred et Marie Maier, rapportèrent au Journal of Space Flight leurs expériences avec les ovnis, y compris l'enregistrement d'un programme radiophonique dans lequel un code non identifié avait été entendu. Les sœurs enregistrèrent le programme, et d'autres opérateurs de petites radios prétendirent aussi avoir entendu le "message de l'espace". L'OSI fut intéressé et demanda à la Scientific Contact Branch d'obtenir une copie de l'enregistrement s51Edwin M. Ashcraft, Directeur, Contact Division (Scientific), memorandum au Directeur, Bureau de Chicago, Radio Code Recording, 4 Mars 1955 et Ashcraft, Memorandum au Directeur, Support Branch, OSI, 17 Mars 1955.

Des officiers de terrain de la Contact Division (CD), dont Dewelt Walker, prirent contact avec les sœurs Maier, qui frissonnèrent de l'intérêt du gouvernement, et convinrent d'un moment pour les rencontrer n3La Division de Contact a été créée pour recueillir de l'information de renseignement étranger par des sources à l'intérieur des États-Unis s52Voir Directorate of Intelligence Historical Series, The Origin and Development of Contact Division, 11 juillet 1946-1 juillet 1965 (Washington, DC ; CIA Historical Staff, juin 1969). En essayant de s'assurer de la bande magnétique, les officiers de l'Agence rapportèrent qu'ils étaient tombés dans une scène d'Arsenic et Vieilles Dentelles. Il ne manquait plus que le vin de sureau, câbla Walker au Siège. Après avoir épluché l'album où elles conservaient des coupures de presse du temps où elles étaient sur scène, les officiers purent prendre possession de l'enregistrement s53George O. Forrest, Directeur du Bureau de Chicago, memorandum au Directeur, Contact Division for Science, 11 Mars 1955. L'OSI analysa la bande et découvrit qu'il n'y avait rien de plus qu'un code en morse d'une station radio US.

L'affaire en resta là jusqu'à ce que l'ufologue Leon Davidson ne parle avec les sœurs Maier en 1957. Les sœurs se souvinrent qu'elles avaient parlé avec un M. Walker qui disait faire partie de l'US Air Force. Davidson écrivit alors à un M. Walker, pensant qu'il était un officier de renseignement de l'USAF de Wright-Patterson, pour lui demander si la bande avait été analysée par l'ATIC. Dewelt Walker répondit à Davidson que la bande avait été transmise aux autorités chargées de l'évaluer, et qu'aucune information n'était disponible quant aux résultats. Insatisfait et suspectant Walker d'être en fait un officier de la CIA, Davidson écrivit ensuite au DCI Allen Dulles, réclamant de savoir ce que le message codé révélait, et qui était Mr Walker s54Support Division (Connell), memorandum à Dewelt E. Walker, 25 Avril 1957. L'Agence, souhaitant garder secrète l'identité de Walker comme employé de la CIA, répondit qu'une autre agence du gouvernement avait analysé la bande en question et que Davidson aurait des nouvelles de l'USAF s55J. Arnold Shaw, Assistant to the Director, lettre à Davidson, 10 Mai 1957. Le 5 août, l'USAF écrivit à Davidson, disant que Walker était et est un officier de l'USAF, et que la bande était analysée par une autre organisation du gouvernement. La lettre de l'USAF confirmait que l'enregistrement ne contenait qu'un code en morse identifiable, provenant d'une d'une station de radio connue disposant d'une autorisation gouvernementale s56Support (Connell) memorandum to Lt. Col. V. Skakich, 27 Août 1957 s57Lamountain, memorandum to Support (Connell), 20 Décembre 1957.

Davidson écrivit de nouveau à Dulles. Cette fois, il voulut connaître l'identité de l'opérateur morse, et de l'agence qui avait conduit l'analyse. La CIA et l'USAF se trouvaient maintenant dans une impasse. L'Agence avait nié précédemment qu'elle avait effectivement analysé la bande. L'USAF avait aussi nié l'analyse de la bande et avait prétendu que Walker était un officier de l'USAF. Des officiers de la CIA, sous couverture, contactèrent Davidson à Chicago et lui promirent d'obtenir la traduction du code et l'identification du transmetteur, dans la mesure du possible s58Lamountain, cable to Support (Connell), 31 Juillet 1958.

Lors d'une autre tentative pour calmer Davidson, un officier de la CIA, toujours sous couverture et portant son uniforme de l'USAF, contacta Davidson à New-York City. L'officier de la CIA expliqua qu'il n'y avait pas de super-agence impliquée, et que la politique de l'USAF n'était pas de divulguer qui faisait quoi. Tandis qu'il semblait accepter cet argument, Davidson insista néanmoins pour la divulgation du message de l'enregistrement, ainsi que de la source. L'officier consentit à voir ce qu'il pouvait faire s59Support (Connell) cable à Skakich, 3 octobre 1957 s60Skakich, cable à Connell, 9 octobre 1957. Après s'en être assuré auprès du Siège, l'officier de la CIA téléphona à Davidson pour lui dire qu'une recherche consciencieuse avait été faite et, comme le signal était d'une origine américaine connue, la bande et les notes prises à l'époque avaient été détruites pour ménager de la place pour le classement s61Skakich, cable à Connell, 9 octobre 1957.

Saisi d'une vive colère contre ce qu'il percevait comme une volte-face, Davidson dit à l'officier de la CIA que lui et son agence, quelle qu'elle soit, agissaient comme Jimmy Hoffa et la Teamster Union en détruisant des preuves qui pouvaient les accuser s62R. P. B. Lohmann, memorandum pour le Directeur, Contact Division, DO, 9 janvier 1958. Persuadée que tout nouveau contact avec Davidson ne ferait qu'encourager la spéculation, la Division de Contact se lava les mains de la question en rapportant au DCI et à l'ATIC qu'elle ne répondrait plus à Davidson ni n'essaierait plus de le contacter s63Support, cable à Skakich, 20 février 1958 s64Connell (Support) cable à Lamountain, 19 décembre 1957. Ainsi, un incident mineur plutôt bizarre, mal géré par la CIA et l'USAF, s'est transformé en un événement majeur, qui renforça le mystère croissant entourant les ovnis et le rôle de la CIA dans leur étude.

Un autre événement mineur, quelques mois plus tard, s'ajouta aux questions en constante augmentation sur le rôle réel de l'Agence concernant les soucoupes volantes. L'anxiété de la CIA à propos du secret ne fit, une nouvelle fois, qu'empirer les choses. En 1958, le Major Keyhoe accusa l'Agence de demander délibérément à des témoins oculaires d'ovnis de ne pas rendre publiques leurs observations s65Edwin M. Ashcraft, Directeur, Contact Division, Office of Operations, memorandum for Austin Bricker, Jr., Assistant to the Director, Inquiry by Major Donald E. Keyhoe on John Hazen's Association with the Agency, 22 janvier 1959.

L'événement naquit d'une demande de l'OSI de Novembre 1957 à la Division de Contact (CD) obtenir de Ralph C. Mayher, un photographe de KYW-TV à Cleveland, Ohio, certaines photos qu'il avait prises en 1952 d'un objet volant non identifié. Harry Real, un officier de la CD, contacta Mayher et obtint des copies des photos pour analyse. Le jeudi 12, John Hazen, un autre officier de la CD, rendit les 5 photos de l'ovni présumé à Mayher sans commentaire. Mayher demanda à Hazen l'évaluation des photos faite par l'Agence, expliquant qu'il essayait d'organiser une émission TV pour informer le public sur les ovnis. Il voulait mentionner dans l'émission qu'une organisation américaine de renseignement avait examiné les photographies et les avait trouvées intéressantes. Bien qu'il ait conseillé à Mayher de renoncer à cette idée, Hazen déclara que Mayher était un citoyen américain, et qu'il devait prendre lui-même la décision de ce qu'il convenait de faire s66John T. Hazen, memorandum au Directeur, Contact Division, 12 décembre 1957 s67Ashcraft, memorandum to Cleveland Resident Agent, "Ralph E. Mayher," 20 Décembre 1957 n4D'après ce memorandum, les photographies ont été vues à "haut niveau et nous ont été retournées sans commentaire". L'USAF possède les négatifs originaux. Les documents de la CIA ont été probablement détruits.

Plus tard, Keyhoe contacta Mayher qui lui raconta son histoire de la CIA et des photographies. Keyhoe demanda alors à l'Agence de confirmer par écrit l'emploi de Hazen, tentant de mettre au jour le rôle de la CIA dans les enquêtes sur les ovnis. L'Agence s'y opposa, en dépit du fait que les représentants de la CD travaillaient normalement à découvert et qu'ils avaient des justificatifs identifiant leur association avec l'Agence. L'assistant du DCI Dulles, John S. Earman, envoya simplement à Keyhoe une lettre diplomatique notant que, du fait que les ovnis étaient d'un intérêt essentiel pour le Département de l'USAF, l'Agence avait transmis sa lettre à l'USAF pour une réponse appropriée. Comme pour la réponse à Davidson, la réponse de l'Agence à Keyhoe n'a fait qu'alimenter la spéculation selon laquelle l'Agence était impliquée profondément dans les observations d'ovnis. La pression pour la publication des informations de la CIA sur les ovnis continuait de croître n5La question refera surface dans les années 1970s avec l'action en justice du GSW dans le cadre du FOIA.

Bien que l'intérêt de la CIA pour les cas d'ovnis diminuât, elle continua de contrôler les observations d'ovnis. Les officiels de l'Agence ressentaient le besoin de se tenir informés sur les ovnis, ne fût-ce que pour alerter le DCI sur les rapports et événements les plus sensationnels concernant les ovnis s68Robert Amory Junior., DDI, memorandum for Assistant Director/Scientific Intelligence, "Flying Saucers," 26 Mars 1956 s69Wallace R. Lamphire, Office of the Director, Planning and Coordination Staff, memorandum for Richard M. Bissell Junior, Unidentified Flying Saucers (UFO), 11 Juin 1957 s70Philip Strong, Memorandum au Directeur, NPIC, Reported Photography of Unidentified Flying Objects, 27 Octobre 1958 s71Scoville, Memorandum à Lawrence Houston, Conseil Legislatif, Reply to Honorable Joseph E. Garth, 12 juillet 1961 s72Houston, lettre à Garth, 13 juillet 1961.