Stratégie

Kaczynski, Theodore: La société industrielle et son futur, 1995
  1. Les technophiles nous embarquent tous pour un bond d'une rare inconscience dans l'inconnu. La plupart des gens qui comprennent quelque peu ce que le progrès technologique est en train de nous faire n'en adoptent pas moins une attitude passive, car ils pensent que tout cela est inévitable. Mais nous (FC) ne sommes pas de cet avis. Nous pensons que cela peut être arrêté, et nous donnerons ici certaines indications pour ce faire.
  2. Comme nous l'avons établi au paragraphe 166, les 2 tâches à mettre en œuvre sont : l'augmentation du stress et de l'instabilité sociale et le développement et la propagation d'une idéologie qui s'oppose à celle dispensée par le système techno-industriel. Quand le système deviendra suffisamment instable et soumis à de rudes pressions, une révolution contre la technologie deviendra possible. Les sociétés russes et françaises, plusieurs décades avant leurs révolutions respectives, avaient montré des signes croissants de tensions et de faiblesse. Dans le même temps, des idéologies étaient développées qui offraient une vue du monde radicalement différente de l'ancienne. Dans le cas russe, les révolutionnaires travaillaient activement à saper les fondements de l'ordre ancien. Ainsi, lorsque le système fut soumis à des rudes pressions (crise financière en France, défaites militaires en Russie), il fut balayé par la révolution. C'est ce que nous allons proposer dans cet esprit.
  3. On pourrait objecter que les révolutions Russes et Françaises furent des échecs. Mais la plupart des révolutions ont deux buts. L'un est de détruire une forme obsolète de société, et l'autre est de mettre en place une nouvelle société selon les vœux des révolutionnaires. Les révolutions Françaises et Russes échouèrent (heureusement !) à créer la nouvelle société qui avait été rêvée, mais elles furent victorieuses pour ce qui est de la destruction de l'ordre ancien.
  4. Mais une idéologie, si elle veut bénéficier d'un soutien enthousiaste, doit avoir des idéaux positifs tout autant que négatifs ; il faut être pour quelque chose tout autant que contre autre chose. L'idéal que nous proposons est la Nature. C'est-à-dire la nature vierge ; tout ce qui vit et se développe sur Terre en dehors de toute interférence et contrôle humain. Et avec la nature vierge, nous incluons la nature humaine, c.a.d ces aspects du comportement humain qui ne sont pas sujet aux régulations d'une société organisée, mais dus à la chance, au hasard, ou à Dieu (selon vos croyances ou opinions philosophiques).
  5. La Nature fournit un contre-idéal parfait à la technologie pour plusieurs raisons. La nature (qui est en dehors du pouvoir du système) est à l'opposé de la technologie (qui cherche à accroître indéfiniment le pouvoir du système). La plupart des gens estiment que la Nature est belle ; elle bénéficie certainement d'un très fort attrait populaire. Les écologistes radicaux ont déjà une idéologie qui exalte la nature et s'oppose à la technologie n1Un autre avantage de la Nature comme contre-idéal, est, que pour beaucoup de gens, elle inspire une sorte de respect associé à la religion, ce qui fait que la Nature peut éventuellement être idéalisée sur des bases religieuses. C'est vrai que dans beaucoup de sociétés, la religion a servi de support et de justification à l'ordre établi, mais il est aussi vrai qu'elle a fourni des fondements pour la rébellion. Ainsi, il peut être utile d'introduire un élément religieux dans la révolte contre la technologie, d'autant plus que la société occidentale n'a plus de solides fondations religieuses de nos jours. Actuellement, la religion est soit utilisée comme un moyen dérisoire et évident pour l'égoïsme à courte vue (beaucoup de conservateurs en font cet usage) ou même est cyniquement employée pour faire de l'argent facile (par la plupart des évangélistes), soit a dégénéré en un irrationalisme trivial (sectes fondamentalistes, "cultes"), soit stagne (Catholicisme, majeure partie du Protestantisme). Ce qu'il y a eu de plus proche d'une religion ces dernières années est la para-religion du "gauchisme", mais le "gauchisme" actuellement est émietté, et n'a plus de but clair et unificateur. Ainsi, il y a un vide religieux dans notre société qui peut éventuellement être comblé par une religion basée sur la nature par opposition à la technologie. Mais ce serait une erreur de concocter artificiellement une religion pour tenir ce rôle. Une telle religion "inventée" serait probablement un échec. Prenons l'exemple du mysticisme "Gaïa". Ses adhérents y croient-ils VRAIMENT ou jouent-ils un rôle ? Si c'est le cas, leur "religion" finira par faire un flop. Il vaut mieux ne pas essayer d'introduire la religion dans le conflit Nature/technologie, à moins que vous ne croyiez VRAIMENT à cette religion et trouviez qu'elle ne réponde à de profondes et authentiques aspirations chez beaucoup d'autres gens.. Il n'est pas nécessaire dans l'intérêt de la nature de mettre en œuvre des utopies chimériques ou un quelconque ordre social nouveau. La nature s'occupe très bien d'elle-même : c'est une création qui a existé longtemps avant que l'homme n'apparaisse, et durant des millénaires différents types de sociétés humaines ont coexisté avec la nature sans lui infliger de sérieux dommages. Ce ne fut qu'avec la Révolution Industrielle que les effets de la société contre la nature s'avèrent désastreux. Pour lever la pression sur la nature, il n'est pas nécessaire de créer un nouveau type de rapports sociaux, il suffit de se débarrasser de la société technologique. Nous vous accordons que cela ne résoudra pas tous les problèmes. La société techno-industrielle a déjà fait des dégâts considérables à la nature, et la convalescence sera longue. D'un autre côté, même les sociétés préindustrielles ont pu faire des dommages significatifs à la nature. Quoiqu'il en soit, se débarrasser de la société industrielle sera en soit un grand acte. Cela débarrassera la nature de la majorité de ses tourments, et lui permettra de panser ses plaies. Cela nous débarrassera de la capacité de la société organisée d'accroître son contrôle sur la nature (nature humaine comprise). Quelque soit le type de société qui existera après la disparition du système industriel, il est certain que la plupart des gens vivront près de la nature, car en l'absence de technologie avancée, il n'y a pas d'autre moyen pour les gens de vivre. Pour se nourrir, il devront être paysans ou bergers ou pêcheurs ou chasseurs, etc. Et, de manière générale, l'autonomie locale aura tendance à accroître, puisque l'absence de technologie avancée et de communications rapides limiteront la capacité des gouvernements ou autres grandes organisations à contrôler les communautés locales.
  6. Comme conséquences négatives de l'élimination de la société industrielle - eh bien, nous ne seront plus des coqs en pâte, ni quoi que ce soit d'approchant. Pour obtenir une chose, vous devez en sacrifier une autre.
  7. La plupart des gens détestent les problèmes psychologiques. Pour cette raison, ils évitent les réflexions profondes à propos des problèmes sociaux, et préfèrent qu'on leur fournissent des options simples, manichéennes : ceci est totalement bon, et cela totalement mauvais. L'idéologie révolutionnaire doit en conséquence être développée sur 2 niveaux.
  8. Au niveau le plus sophistiqué, l'idéologie doit s'adresser aux gens intelligents, cultivés, et rationnels. L'objectif doit être de créer un noyau de personnes qui seront opposés au système industriel de façon censée et réfléchie, capables d'apprécier tous les tenants et aboutissants, et d'assumer le prix à payer pour se débarrasser du système. Il est particulièrement important d'attirer des gens de la sorte, car ils sont capables et susceptibles d'en influencer d'autres. On doit s'adresser à ces gens de la manière la plus rationnelle possible. Les faits ne doivent pas être intentionnellement déformés et un langage émotionnel doit être proscrit. Ceci ne signifie pas qu'on ne doive pas faire appel à leur sensibilité, mais ce faisant, on ne doit distordre la réalité ou faire quoi que ce soit qui pourrait détruire la respectabilité intellectuelle de l'idéologie.
  9. A un second niveau, l'idéologie doit être propagée sous une forme simplifiée qui doit permettre à la masse de percevoir le conflit entre la technologie et la nature en des termes dénués de toute ambiguïté. Mais même sur ce second plan, l'idéologie ne doit pas s'exprimer dans un langage trop pauvre, trop irrationnel ou passionnel qui pourrait nous aliéner les gens du premier groupe. Une propagande de bas niveau peut parfois apporter d'impressionnants résultats à court terme, mais il est plus avantageux sur le long terme de conserver la loyauté du petit noyau "d'intellectuels engagés" que de compter sur les passions d'une foule amorphe dont l'attitude peut changer si de nouveaux gadgets propagandistes apparaissent. Toutefois, une propagande de bas niveau pourra s'avérer nécessaire lorsque le système sera sur le point de s'effondrer et qu'il y aura un ultime combat entre idéologies rivales pour déterminer laquelle deviendra dominante quand la vieille vue du monde aura disparu.
  10. Avant ce combat final, les révolutionnaires ne doivent pas espérer avoir la majorité du peuple avec eux. L'histoire est faite par des minorités agissantes, déterminées, pas par la majorité, qui a rarement une vue claire et précise de ce qu'elle veut réellement. Avant que ne soit venue l'heure du coup de boutoir final de la révolution n2Supposons qu'un tel coup de boutoir final advienne. En pratique, le système techno-industriel devra être éliminé pans par pans, graduellement (voir paragraphes 4, 167 et note 4., la tâche des révolutionnaires sera moins d'avoir l'appui de la majorité que de fonder un noyau de gens extrêmement décidés.
  11. N'importe quel type de conflit social aide à déstabiliser le système, mais on doit être prudent sur le genre de type de conflit que l'on encourage. Le conflit doit se dessiner entre la masse du peuple et l'élite détentrice du pouvoir dans la société industrielle (politiciens, scientifiques, hommes d'affaires de haut niveau, etc ...). Il ne doit pas se dessiner entre les révolutionnaires et le peuple. Par exemple, ce serait de la mauvaise stratégie que de condamner les Américains sur leurs habitudes de consommation. Au lieu de cela, l'américain moyen peut être représenté comme une victime des industries du marketing et de la publicité, qui le leurre en lui faisant acheter un tas de cochonneries qu'il ne désire pas et qui sont une piètre consolation à sa perte de liberté. Chaque approche est cohérente avec les faits. C'est simplement une question d'optique selon que vous condamnez les industries du marketing et de la publicité, ou que vous condamnez le public pour se laisser ainsi manipuler. Il est de bonne stratégie de généralement éviter de condamner le public.
  12. On doit y réfléchir à 2 fois avant d'encourager d'autres conflits sociaux que ceux qui adviennent entre la techno-élite et la masse. D'une part, les autres conflits tendent à distraire l'attention des conflits primordiaux (entre la techno-élite et la masse, entre la technologie et la nature) ; d'autre part, les autres conflits peuvent actuellement tendre à encourager le recours à la technologie, car chacune des parties dans le conflit veut utiliser ce que peut offrir la technologie de façon à prendre l'ascendant sur son adversaire. C'est ce qu'on voit clairement dans le cas des rivalités entre nations. Cela apparaît aussi lors de conflits ethniques dans un même pays. Par exemple, aux Etats-Unis, les leaders noirs sont décidés à favoriser la cause noire en plaçant des noirs au sein de la techno-élite. Ils veulent qu'il y ait beaucoup de noirs au gouvernement, beaucoup de scientifiques, chefs d'entreprises noirs, et ainsi de suite. Ce faisant, il aide le système à absorber la culture noire. D'une manière générale, on ne doit encourager que les conflits sociaux qui rentrent dans le cadre élite/masse ou technologie/nature.
  13. Mais le moyen de décourager les conflits ethniques n'est pas de militer pour le droit des minorités (voir paragraphes 21, 29). Au lieu de cela, le révolutionnaire doit mettre en avant que le fait qu'une minorité soit plus ou moins lésée n'est qu'un problème secondaire. Notre véritable ennemi est le système techno-industriel, et dans le combat contre le système, les distinctions ethniques n'ont aucune importance.
  14. Le type de révolution que nous avons en tête n'implique pas nécessairement une insurrection armée contre un gouvernement. Elle peut impliquer ou non l'usage de la violence, mais elle ne sera pas une révolution politique. Elle doit se polariser sur l'économie et la technologie, pas sur la politique n3Il est même concevable que la révolution pourra consister simplement en un changement d'attitude globale vis à vis de la technologie qui provoquera un lent déclin sans douleur du système techno-industriel. Mais si c'est le cas, nous aurions beaucoup de chance. Il est bien plus probable que le passage à une société non industrielle sera très difficile et générera de nombreux conflits et désastres..
  15. En fait, les révolutionnaires doivent même éviter tout rapport au politique, de manière légale ou non, jusqu'à ce que le système soit acculé et ait prouvé aux yeux de presque tous son échec. Supposons par exemple qu'un parti écologiste ait la majorité au congrès suite à une élection. Pour éviter d'avoir à trahir ou édulcorer leur propre idéologie, ils devront prendre des mesures drastiques pour passer d'une économie de développement à une économie de "croissance zéro". Le résultat apparaîtra désastreux à l'homme moyen : Le chômage grimpera en flèche, etc. Même si les pires inconvénients peuvent être évités grâce à une habileté surhumaine, les gens devront tout de même abandonner une partie du confort dont il étaient devenus dépendants. L'insatisfaction augmentera, le parti écologiste sera discrédité et les révolutionnaires auront subi un sérieux revers. Pour cette raison, les révolutionnaires ne doivent pas essayer d'acquérir un pouvoir politique jusqu'à ce que le système se soit mis dans un tel pétrin que n'importe quel échec sera perçu comme provenant intrinsèquement du système lui-même et pas du fait des révolutionnaires. La révolution contre la technologie devra probablement être une révolution des outsiders, une révolution venue du bas et non pas du haut.
  16. La révolution doit être internationale et à l'échelle de la planète. Elle ne peut être circonscrite dans un cadre national. Si jamais il est suggéré que les Etats-Unis, par exemple, doivent en finir avec le progrès technologique et la croissance économique, les gens deviendront hystériques et hurleront que si nous ne sommes pas à la pointe de la technologie, les Japonais le seront. Ces mêmes personnes deviendront comme folles s'il advient que les Japonais vendent plus de voitures que nous (Le nationalisme promeut grandement la technologie). Plus raisonnablement, on peut avancer que si les pays relativement démocratiques laissent tomber la technologie tandis que les pays totalitaires comme la Chine, la Corée du Nord ou le Vietnam poursuivent sur le chemin du progrès, les dictateurs risquent de finir par dominer le monde. C'est pourquoi la technologie doit être attaquée dans tous les pays simultanément, dans la mesure du possible. Bien sûr, il n'est pas certain que le système techno-industriel puisse être détruit approximativement au même instant partout dans le monde, et il est même concevable que les tentatives de se débarrasser du système puisse amener au contrôle du système par des dictateurs. C'est un risque à prendre. Et on peut le prendre ; car la différence entre un système techno-industriel "démocratique" et un contrôlé par des dictateurs est infiniment moindre que celle entre un système techno-industriel et un qui ne l'est pas n4La structure économique et technologique d'une société est de loin plus importante que la structure politique pour déterminer la façon dont l'homme moyen vit (voir paragraphes 95, 119 et notes 16 et 18).. On peut même avancer qu'un système techno-industriel contrôlé par des dictateurs pourrait être préférable, car ceux-ci se sont avérés généralement inefficaces, ce qui fait qu'ils auront plus de chance de s'effondrer. Voyez Cuba.
  17. Les révolutionnaires doivent être favorables aux mesures qui tendent à unifier l'économie mondiale. Les accords libre-échangistes comme le NAFTA ou le GATT sont probablement préjudiciables pour l'environnement à court terme, mais à long terme, ils peuvent probablement être avantageux car ils vont accroître l'interdépendance économique entre nations. Il sera plus facile de détruire le système techno-industriel à l'échelle planétaire si l'économie est tellement globalisée qu'un effondrement dans un pays du G7 entraînera la même chose dans toutes les nations industrialisées.
  18. Certaines personnes prennent pour argument que l'homme moderne a trop de pouvoir, trop de contrôle sur la nature pour souhaiter une attitude plus passive en ce qui concerne la race humaine. Au mieux ces gens ne se rendent pas bien compte de la réalité, car ils sont incapables de faire la différence entre le pouvoir des grosses institutions et celui des individus ou des petits groupes. C'est une erreur de prôner la réduction de pouvoir ou la passivité, car les gens ont besoin de pouvoir. L'homme moderne en tant qu'entité collective - c.a.d le système industriel - a un immense pouvoir sur la nature, et nous (FC) considérons cela comme mauvais. Mais les individus modernes ou les petits groupes d'individus ont bien moins de pouvoir que l'homme primitif n'en avait. De manière générale, l'énorme pouvoir de l'homme moderne sur la nature est exercé non par des individus ou des petits groupes, mais par d'énormes institutions. Pour comprendre le pouvoir que la technologie alloue à l'homme moderne moyen, il ne faut pas perdre de vue les limites étroites qui lui sont imposées ainsi que le contrôle et la surveillance exercés par le système (vous avez besoin d'une autorisation pour n'importe quoi, et viennent avec lois et réglementations). L'individu a seulement les pouvoirs technologiques que le système choisit de lui octroyer. Son pouvoir personnel sur la nature est très faible.
  19. Les individus des sociétés primitives et les groupes restreints avaient à l'époque un pouvoir considérable sur la nature, ou il serait plus juste de dire qu'il avait du pouvoir au sein de la nature. Quand l'homme primitif avait besoin de nourriture, il savait où trouver et comment préparer les végétaux comestibles, comment chasser et il le faisait avec des armes qu'il avait faites lui-même. Il savait aussi comment se protéger de la chaleur, du froid, de la pluie, des animaux dangereux, etc. Mais l'homme primitif a fait des dommages négligeables à la nature parce que le pouvoir collectif des sociétés primitives était ridicule comparé à celui de notre société industrielle.
  20. Au lieu de défendre la perte de pouvoir et la passivité, on devrait plutôt se dire que le pouvoir du système industriel doit être détruit, et que cela augmentera considérablement le pouvoir et la liberté des individus et des petits groupes.
  21. Jusqu'à ce que le système soit définitivement démantibulé, la destruction de ce système doit être l'unique but des révolutionnaires. Tous les autres buts disperseront l'effort. Plus grave, si les révolutionnaires se permettent de poursuivre d'autres buts, ils seront tentés d'utiliser la technologie comme moyen d'arriver à leurs fins. S'ils donnent dans ce travers, ils retomberont dans le piège technologique, car la technologie moderne est un système unifié, aux parties étroitement imbriquées, ce qui fait que vouloir n'en n'utiliser qu'une partie obligera à l'utiliser dans sa quasi-totalité, ce qui au bout du compte la laissera presque intacte.
  22. Supposons par exemple que les révolutionnaires prennent la "justice sociale" comme but. La nature humaine étant ce qu'elle est, la justice sociale ne viendra pas de manière spontanée, il faudra lui donner un coup de pouce. Pour ce faire, les révolutionnaires devront centraliser et contrôler. Pour cela, ils auront besoin de moyens de communication et de déplacement longues distances rapides, et de ce fait, de ce tout ce qu'apporte la technologie dans ces domaines. Pour nourrir et vêtir les pauvres, ils feront appel aux technologies industrielles et agricoles. Et ainsi de suite. Ainsi, la volonté d'assurer la justice sociale maintiendra des pans entiers du système techno-industriel. Ce n'est pas que nous ayons quelque chose contre la justice sociale, mais il ne doit pas être permis d'interférer dans l'effort de destruction du système.
  23. Il serait sans espoir pour les révolutionnaires d'essayer de s'attaquer au système sans utiliser quelques moyens qu'offre la technologie moderne. Au moins, les moyens de communications pour faire passer leur message. Mais ils ne doivent le faire que dans un seul but : attaquer le système techno-industriel.
  24. Imaginons un alcoolique assis devant un tonneau de vin. Supposons qu'il se dise : le vin n'est pas mauvais s'il est consommé avec modération. On dit même que de petites quantités de vin sont bonnes pour la santé ... Ca ne me fera pas de mal d'en boire un petit coup.... Bien sur, vous savez ce qui arrive. N'oubliez jamais que vis à vis de la technologie, la race humaine est comme un alcoolique devant un tonneau de vin.
  25. Les révolutionnaires doivent avoir autant d'enfants qu'ils peuvent. C'est une évidence scientifique que les attitudes sociales sont en grande partie héritées. Personne ne soutient qu'une attitude sociale est une conséquence directe de la carte génétique d'un individu, mais il apparaît que c'est globalement le cas dans notre société. Des objections contre ces assertions ont déjà été émises, mais elles sont discutables et semblent idéologiquement motivées. Dans tous les cas, personne ne peut nier qu'un enfant aura à peu prêt les mêmes attitudes sociales que ses parents. De notre point de vue, que ces attitudes soient le résultat de l'hérédité ou du milieu, cela ne nous importe guère. Le fait est qu'elles soient transmises.
  26. L'ennui, c'est que la plupart des gens qui ont tendance à se rebeller contre le système techno-industriel sont aussi préoccupés par les problèmes démographiques, ce qui fait qu'ils préfèrent avoir pas ou peu d'enfants. Ce faisant, ils laissent le monde entre les mains de ceux qui soutiennent ou au moins acceptent le système techno-industriel. Pour assurer la force de la prochaine génération de révolutionnaires, leurs contemporains doivent avoir une importante descendance. En le faisant, il n'augmenteront que légèrement les problèmes de démographie. Ce qu'il y a de plus important, c'est de mettre à bas le système ; et comme vu au paragraphe 167, une fois cela fait, la population mondiale ne pourra que décroître. Par contre, si le système techno-industriel survit, il permettra de nourrir une population mondiale en croissance infinie.
  27. Du point de vue de la stratégie révolutionnaire, le seul point sur lequel nous devons absolument insister, c'est le fait que l'unique but doit être l'élimination de la technologie moderne, et qu'aucun autre ne doit interférer avec celui-ci. Pour le reste, les révolutionnaires doivent rester pragmatiques. Si l'expérience montre que certains conseils indiqués plus haut ne donnent pas de bons résultats, il ne faut pas hésiter à s'en débarrasser.