L'autonomie

Kaczynski, Theodore: La société industrielle et son futur, 1995
  1. l'autonomie comme partie du processus de pouvoir peut ne pas être nécessaire à tous les individus. Mais la plupart des gens ont besoin d'un degré plus ou moins grand d'autonomie pour parvenir à leurs fins. Leurs efforts doivent être entrepris de leur propre initiative et conduit sous leur direction et leur contrôle. Déjà, la majorité des gens ne s'occupent pas seuls de cette initiative, de ce contrôle et de cette direction. Il suffit d'ordinaire d'agir comme membre d'un petit groupe. Ainsi, si une demi-douzaine de personnes discutent d'un but entre eux et font un effort commun pour l'obtenir, leur besoin de processus de pouvoir sera satisfait. Mais s'ils travaillent sous la tutelle d'un encadrement rigide s'exerçant de haut en bas et ne laissant aucune place à la décision autonome et à l'initiative, alors leur besoin ne sera pas satisfait. Il en est de même quand les décisions sont prises quand le groupe est si gros que le rôle de chaque individu est insignifiant n1On peut avancer que la majorité des gens ne veulent pas prendre des décisions par eux-mêmes, mais préfèrent que des leaders le fassent pour eux. Il y a du vrai là-dedans. Les gens aiment prendre des décisions sur des sujets anodins, mais le faire sur des questions complexes, fondamentales impose de faire face aux conflits d'ego et la majorité des gens haïssent ce genre de conflits. C'est pourquoi ils se reposent sur d'autres pour s'occuper de ces questions. En général, les gens sont des suiveurs, pas des leaders, mais ils veulent pouvoir être en communication directe avec lesdits leaders et participer par certains côtés aux décisions difficiles. Ils ont besoin d'autonomie, au moins à ce niveau..
  2. Il est vrai que certains individus ne semblent avoir qu'un faible besoin d'autonomie. Soit leur besoin de pouvoir est faible, soit ils se satisfont en s'identifiant à la puissante organisation à laquelle ils appartiennent. Et, de ce fait, ils sont décervelés, comme des animaux qui se satisfont d'un sentiment de pouvoir purement physique (le bon soldat content de développer des techniques de combat dans le but d'une obéissance aveugle à ses supérieurs).
  3. Mais pour beaucoup de gens, c'est par le biais du processus de pouvoir - avoir un but, faire un effort autonome et atteindre ce but - que l'estime de soi, la confiance en soi, et un sentiment de pouvoir sont acquis. Quand quelqu'un n'a pas l'occasion de se colleter avec le processus de pouvoir, les conséquences sont (en fonction de l'individu et de la façon dont se disloque le processus de pouvoir) l'ennui, la démoralisation, une faible estime de soi, des sentiments d'infériorité, du défaitisme, de la dépression, de l'anxiété, de la culpabilité, de la frustration, de l'hostilité, des mauvais traitements à la femme ou aux enfants, un hédonisme exagéré, un comportement sexuel anormal, des troubles du sommeil ou de l'appétit, etc. n2Certains des symptômes exposés sont similaires à ceux des animaux en captivité : Expliquons comment ces symptômes apparaissent avec l'impossibilité de réaliser son processus de pouvoir. Le sens commun à propos de la nature humaine nous enseigne que la perte de buts requérant des efforts conduit à l'ennui, et que cet ennui à la longue amène à la dépression. L'impossibilité de parvenir à ces buts entraîne la frustration et l'affaiblissement de l'estime de soi. La frustration conduit à la colère, puis à l'agressivité, souvent à l'encontre des femmes et enfants. Il a été démontré qu'une frustration qui perdure se mue en dépression et que cette dernière génère culpabilité, trouble du sommeil, de l'appétit et des sentiments antisociaux. Les dépressifs recherchent le plaisir comme antidote ; ce qui donne un hédonisme insatiable, une sexualité débridée, agrémentée de perversions comme autant de stimulants. L'ennui aussi fait rechercher un plaisir excessif, puisque, en l'absence d'autres buts, le plaisir devient un but en soi. Ce qui précède est une simplification. La réalité est plus complexe, et évidemment, l'impossibilité de réaliser son processus de pouvoir n'est pas la SEULE cause des symptômes décrits. Ainsi, lorsque nous parlons de dépression, nous ne pensons pas nécessairement à la dépression clinique. En général, nous nous référons à des formes bénignes de dépression. Et quand nous parlons de buts, il ne s'agit pas nécessairement non plus de buts à long terme, hors d'atteinte. Pour la majorité des gens au cours de l'histoire humaine, les buts de base (c.a.d, se nourrir soi-même et sa famille au jour le jour) ont été amplement suffisants.