Les nuages invisibles étaient distribués

La figure 14 confirme que les sources des échos anormaux présentent une dispersion des altitudes assez grande. L'altitude moyenne est plus basse que celle des F-16 et que celle qui était indiquée à ce moment par le radar de Semmerzake (II.397). Elle est même parfois très basse, ce qui est compatible avec l'idée de traînées de convection. Les radars au sol attribuent à un groupe de nuages invisibles un écho unique, puisque la résolution est limitée. Il sera associé aux dômes des bulles de convection, où le signal est le plus fort. Les F-16 peuvent détecter par contre des masses d'air humide à différents endroits. La figure 14 indique en tout cas qu'il n'y avait pas une seule masse d'air humide, bien localisée. M. Gilmard6 est arrivé à la même conclusion par une voie différente.

Il cherchait à déterminer les lieux géographiques des sources des échos pour les différentes tentatives d'interception. Il l'a fait en utilisant deux méthodes distinctes (II.401). La méthode directe se base uniquement sur les données enregistrées par le second F-16, en situant les sources des échos par rapport à la base de Beauvechain (plages vertes, anguleuses, sur la figure 10.4 du dossier photo du second rapport5). L'autre méthode est indirecte et plus imprécise, puisqu'elle combine les valeurs enregistrées pour l'azimut et la distance avec la trace du premier F-16, fournie par le radar de Semmerzake (plages bleues, arrondies). M. Gilmard en avait tiré trois conclusions:

  1. "Aucune erreur grossière n'a été commise par la plate-forme d'inertie. En effet, pour calculer la position de la cible par rapport à Beauvechain, le radar ajoute à la position du F-16 que lui fournit la centrale inertielle, la position relative de la cible considérée...
  2. Les positions des cibles ne semblent pas former une structure régulière. Cette observation nous permet d'affirmer que dans la mesure où les cibles correspondent effectivement à des objets matériels (ce qui n'est pas encore démontré), il est plus que probable que les différentes interceptions ne se rapportent pas à un seul objet !
  3. Les interceptions 8, 9 et 10 sont relatives aux F-16. En vol de formation de nuit, observer son compagnon, afin de mieux garder ses distances ou bien afin de le suivre dans ses man?uvres, est plus aisé au radar qu'à l'?il nu."

Les verrouillages 8, 9 et 10 permettent de mieux apprécier les écarts fournis par les deux méthodes de calcul. Notons que M. Gilmard a écarté le premier contact, probablement parce qu'il était très court et parce qu'il impliquait un éloignement. Il ne subsiste alors que 9 essais d'interception, comme l'a affirmé le Major Lambrechts, sans autres précisions (I.226).

La deuxième conclusion de M. Gilmard résulte du fait que les "objets" détectés ont été localisés dans un grand rectangle au sud de Bruxelles, entre Leuven, Gembloux et Soignies (II. figure 10.4). Les F-16 étaient pourtant dirigés vers leur cible par le CRC de Glons (I.226). L'existence de différentes masses d'air humide qui sont séparées les unes des autres, comme cela arrive souvent pour des nuages visibles, rend compte des observations visuelles des gendarmes. Il suffit d'admettre que l'air humide était plus chaud que l'air environnant pour que cela donne lieu à des réfractions anormales de la lumière visible (II.408).

Puisque le radar des F-16 réalise une classification des échos à partir de la mesure des distances et vitesses relatives, j'ai également représenté les mesures dans le plan d-v. La figure 15 montre que la dispersion des points y est trop grande pour une élimination par le suiveur et suppresseur de fouillis.


Figure 15 : Les échos anormaux, caractérisés par la distance et la vitesse par rapport au F-16

Jusqu'à preuve du contraire, l'explication proposée pour les mystérieux enregistrements radar des F-16 reste donc logique et cohérente. Elle est fondée sur des concepts théoriques raisonnables et justifiés. En outre, elle est en accord avec l'ensemble des faits observés.

Figure 10.4 extraite du second rapport de la SOBEPS