L'extraction des échos recherchés et l'élimination des autres

Il est vital pour le pilote qu'il puisse se fier à son radar. Ce système doit donc capter et présenter les échos provenant d'avions, en rejetant les échos anormaux. La figure 7 illustre la situation pour un vol horizontal. Le faisceau radar peut toucher par exemple l'avion 1 qui se trouve à une distance d du F-16 et qui s'en approche avec une vitesse relative v quand il est pourchassé. Nous savons qu'il peut y avoir des rétrodiffusions quand le faisceau radar éclaire une masse d'air humide H ou quand il touche le sol en S, par exemple. Cet endroit s'approche du F-16 à une vitesse vs que l'ordinateur calcule à partir d'autres données (la vitesse et l'altitude du F-16, ainsi que l'orientation du faisceau).


Figure 7 : Les sources possibles d'échos radar pour un chasseur F-16.

En plus du faisceau formé par le lobe principal de l'antenne, il y a des lobes secondaires. L'émission et la réception y sont nettement plus faibles, mais ils peuvent capter des échos venant de différents endroits du sol, aussi bien derrière que devant l'avion, les vitesses relatives étant comprises entre plus et moins la vitesse de l'avion par rapport au sol. La probabilité de ce type de détection est la plus grande pour la partie S' du sol, située juste au-dessous de l'avion, puisque la distance à parcourir y est la plus courte. L'intensité du signal reçu varie en effet comme 1/d4 (à cause de la divergence des rayons émis et diffusés). La vitesse relative de S' est nulle.

L'ordinateur analyse les signaux qu'il capte au fur et à mesure de leur arrivée, afin d'en extraire les informations utiles et d'en éliminer les échos perturbateurs. Puisque le chasseur F-16 peut se trouver en présence de plusieurs avions, il doit pouvoir séparer ces échos. Il le fait au moyen des paramètres mesurés : la distance et la vitesse relative. Pour un train d'onde donné, il s'agit de la distance ambiguë d et de la vitesse radiale v, comprise entre -vm et +vm. Le signe est positif pour une vitesse d'approche (closing speed). Le radar peut donc réaliser une classification des échos dans un plan d-v, comme le montre la figure 8.

En fait, pour une orientation donnée du faisceau, le radar analyse d'abord la portion du signal qui a été renvoyée le plus rapidement et ensuite, des portions qui arrivent de plus en plus tardivement. Cela correspond à des distances croissantes. L'échantillonnage est réalisé de telle manière que le domaine des distances possibles d est découpé en portions de même largeur d. Elle est déterminée par la largeur t des impulsions individuelles, puisqu'il est impossible de séparer les impulsions les unes des autres, si les durées d'un aller-retour ne diffèrent pas au moins de t/2. Le plus petit intervalle de distance mesurable sera donc d = ct/2. On ouvre l'une après l'autre des "portes de distance" de cette largeur. Puisque la distance maximale dm dépend de la fréquence d'échantillonnage fo, on se contente d'imposer un nombre maximal de portes de distance juxtaposées, pouvant aller jusqu'à 128.


Figure 8 : Classification des échos radar dans le plan d-v.

Pour chacune de ces portes de distance, c'est-à-dire pendant un laps de temps très bref, l'ordinateur examine l'ensemble des impulsions qu'il reçoit en retour pour le train d'onde qui vient d'être envoyé. Il détermine les vitesses relatives v des différents réflecteurs, en mesurant les changements de fréquence DF. Cela se fait au moyen d'un processeur électronique et d'un banc de filtres qui découpent directement le spectre des fréquences en 64 parties de même largeur. On obtient ainsi une certaine intensité du signal pour 64 portes de vitesse, en déterminant aussi le signe. On définit donc un ensemble de "cases" pour une portion limitée du plan d-v. Quelques-unes de ces cases sont indiquées dans le coin supérieur gauche de la figure 8.

Les intensités du signal pour l'ensemble des cases créées dans le plan d-v définissent une matrice qui contient toutes les informations reçues. La répartition des intensités peut présenter des maxima pour des cases qui correspondent à des "cibles" différentes. Les points 1 et 2 en sont des exemples, mais il y aura aussi une répartition d'intensités relativement importantes pour des réflecteurs situés au sol (ground clutter). Ce "fouillis" est représenté sur la figure 8 par la plage en gris clair, avec des renforcements pour l'endroit (S) où le lobe principal touche le sol et pour l'endroit (S') qui se trouve à la verticale de l'avion (figure 7). Nous avons déjà noté que l'ordinateur peut calculer la vitesse relative vs de l'endroit (S) où le lobe principal touche le sol, mais la distance peut dépendre du relief. On élimine donc tous les échos qui ont des vitesses assez proches de vs. Cela correspond à une bande verticale sur la figure 8. On écarte aussi une bande horizontale près de d = 0.

En fait, on ne commence l'analyse qu'à partir d'une certaine distance et on impose une transposition (électronique) de tout le spectre des fréquences, de telle manière qu'il suffit de couper ensuite les fréquences proches de zéro. Ce filtrage se réalise d'une manière dynamique, en utilisant constamment la valeur instantanée de vs. Autrement dit, la bande verticale de la figure 8 est déplacée en fonction de la situation de l'avion en vol et de l'orientation instantanée du faisceau. La largeur de cette bande est choisie de telle manière qu'on élimine aussi des échos provenant de réflecteurs mobiles (voitures, trains,...). Le filtrage est assuré par le "suiveur de fouillis" et le "suppresseur de fouillis", mais on prend des précautions pour ne pas éliminer des échos provenant d'avions, comme ce serait normalement le cas pour le point 3 de la figure 8.

On réalise donc pour chaque ligne du plan (d,v) un filtrage plus subtil, régi par un seuil adaptatif. Pour cela, on groupe trois cases adjacentes et on retient le signal pour une des cases, s'il y est plus intense que la valeur moyenne dans les deux autres cases, multiplié par une constante modifiable. C'est une procédure générale qui réduit les effets du bruit et permet de maîtriser le fouillis des lobes secondaires. Pour lever l'ambiguïté des distances, on compare ensuite les résultats obtenus pour différents trains d'ondes. Cette procédure est rapide et efficace, mais nous nous demandons ce qui pourrait se passer pour une masse d'air humide (H). Puisqu'un nuage invisible est pratiquement immobile par rapport au sol, la grandeur de sa vitesse v' par rapport au F-16 est proche de la vitesse vs de la portion du sol que le faisceau éclaire en même temps. L'écho devrait être éliminé, à moins que...