La vitesse maximale mesurable

Meessen, Auguste: Inforespace n° 97 (SOBEPS), décembre 1998

Puisque les F-16 sont dotés d'un radar Doppler à impulsions, on est confronté à une seconde difficulté. Elle concerne la mesure des vitesses. Revenons en effet au cas simple, où le radar émet de manière continue une onde sinusoïdale de fréquence `F`. Le spectre des fréquences serait alors constitué d'une seule raie infiniment mince. Elle correspondrait à la fréquence `F` et il suffirait de mesurer le changement DF de cette fréquence pour déterminer la vitesse `v`. La réalité est un peu plus compliquée, puisqu'il faut utiliser une série de trains d'ondes si l'on veut également mesurer la distance du réflecteur.

Le radar des F-16 émet une onde de fréquence F qui se situe dans le domaine des GHz (la période T » 10-9 s), mais cette onde porteuse est modulée en amplitude, pour former une suite d'impulsions rectangulaires de faible durée (largeur t » 10-6 s). Admettons pour l'instant qu'il y ait une suite infinie d'impulsions qui se succèdent à des intervalles réguliers (To » 10-3 s). La fréquence de récurrence `f_0 = 1/To` se situe alors dans le domaine des kHz. Dans ce cas, on ne peut plus dire que l'onde est monochromatique ! On obtient une raie élargie, constituée d'un ensemble de raies, séparées les unes des autres de f_0. Comme le montre la figure 6, l'enveloppe des amplitudes est donnée par une fonction qui est maximale pour la fréquence F et décroît avec des rebondissements. On peut calculer l'enveloppe (elle varie comme la valeur absolue de `sinx` sur x). Sa largeur caractéristique est égale à `1/t`.

Nous savons qu'il faut envoyer différents trains d'impulsions pour arriver à lever l'incertitude sur les distances. Si chaque train d'impulsions est limité à `N` éléments, les raies internes du spectre des fréquences sont élargies, mais `N` est assez grand pour que nous puissions les représenter par des raies très minces (figure 6). L'importance de ce qui précède résulte du fait que l'effet Doppler produit un glissement de tout le spectre des fréquences. Il se pourrait donc que le déplacement `DF` soit supérieur à `f_0`. Cela dépendra de la grandeur de la vitesse `v`, mais quand DF est égal à un multiple de `f_0`, le spectre du signal reçu coïncide avec le spectre du signal émis. Tout se passe comme si la vitesse v était nulle.

Figure 6 : Le spectre des fréquences d'un train d'ondes et le changement de fréquence `DF` qui résulte de    l'effet Doppler. Il faut que `DF` soit limité pour éviter une ambiguïté des vitesses.
Figure 6 : Le spectre des fréquences d'un train d'ondes et le changement de fréquence `DF` qui résulte de l'effet Doppler. Il faut que `DF` soit limité pour éviter une ambiguïté des vitesses.

Puisqu'on doit tenir compte aussi bien des "cibles" qui s'écartent du F-16 que de celles qui s'en approchent, on exigera que `DF` se situe entre `pmf_o/2`. On doit donc renoncer à la mesure des vitesses qui dépassent une certaine valeur `vm`. Cette vitesse relative maximale est déterminée par la relation `f_0/2 = (2vm/c) F`. Puisque la longueur d'onde de l'onde porteuse est `l = c/F`, on a `vm = f_0l/4`. Pour pouvoir mesurer des vitesses élevées, il faudrait que la fréquence de récurrence `f_0` soit élevée, mais il y a une objection. La distance ambiguë maximale `dm = c/2f_0` serait très petite, si `f_0` était très grand. Il faudrait beaucoup de trains d'ondes différents pour lever l'ambiguïté en distance.

On doit donc accepter un compromis : la valeur de `f_0` sera ni trop grande ni trop petite. Il suffit que la vitesse relative maximale `vm` soit assez élevée pour ne pas être dépassé par la technologie du moment. Pour les F-16, la vitesse relative maximale vm est de l'ordre de 600 noeuds 6. Puisque la vitesse absolue par rapport au sol est calculée, elle peut être plus élevée, mais il y a une limite.