Mystère et boule de feu

Catherine, Vincent: Le Monde, jeudi 8 novembre 1990

3 boules orange, jaune et verte, disposées en triangle, des lumières avec des faisceaux à l'arrière, un ovni triangulaire clignotant : lundi novembre, entre jeudi 8 19 h et jeudi 8 19:10, le ciel de l'Europe de l'ouest appartenait aux objets volants non identifiés. Durant la journée du novembre, des centaines de témoignages ont été recueillis, auprès de simples passants ou de professionnels de l'aviation, qui avaient observé ces étranges phénomènes lumineux dans le ciel de Bischwiller (Bas-Rhin), au-dessus de Nantes (Loire-Atlantique), au voisinage des aéroports d'Orly et de Roissy, mais aussi en Allemagne, en Belgique et en Grande-Bretagne.

Les spécialistes excluent l'hypothèse d'une hallucination collective. Sans pour autant expliquer le phénomène, tout à fait exceptionnel, souligne M. Jean-Jacques Velasco, directeur du service d'expertise des phénomènes de rentrée atmosphérique (SEPRA) du Centre national d'études spatiales (CNES). Exceptionnel par sa durée - plusieurs minutes, alors que les rentrées de corps dans l'atmosphère n'excèdent jamais quelques dizaines de secondes, - mais aussi par sa nature : les témoignages concordent à décrire une boule incandescente située à l'intérieur, voire à l'arrière d'un triangle lumineux, alors que la chute d'objets célestes se traduit généralement par des points lumineux situés à l'arrière de la traînée de feu. Débris de satellites brûlant ? Ballons stratosphériques ? Explosion d'un météore ? A l'heure actuelle, il n'est pas possible de se prononcer, affirment les spécialistes français.

La Direction générale de l'aviation civile confirme que rien n'a été enregistré sur les radars civils. Au sud de Lorient, l'équipage de la frégate de défense anti-aérienne de la marine nationale, le Jean-Bart, a également aperçu une lumière multiple clignotante, en forme triangulaire de grande dimension, se déplaçant rapidement sous la couche nuageuse. Mais les appareils, là encore, n'ont pas réagi.

Dès mardi, le SEPRA a invité les témoins à lui fournir toutes les précisions sur leurs observations, par l'intermédiaire des organismes publics. L'ampleur des témoignages devrait, pour la 1ʳᵉ fois, nous permettre de recueillir des données exploitables par les ordinateurs, et d'établir une sorte de portrait-robot du phénomène, affirme son directeur, avec une pointe de jubilation.