Utopie

Le terme "utopie" trouve son origine dans un roman de Thomas More, un précurseur anglais du socialisme. Cette œuvre, publiée en , fut écrite en réaction à la misère qui sévissait dans les grands centres urbains d'Angleterre, parmi les paysans chassés de leurs terres par le développement de la grande propriété agricole et par l'essor de l'industrie textile naissante. Elle décrit par le menu la vie dans une île imaginaire et "idyllique " (mais à l'organisation strictement hiérarchisée, s'appuyant sur l'exploitation des esclaves pour les tâches les plus ingrates) qui ignore l'existence de la propriété privée.

Au cours des siècles qui suivront, de nombreux auteurs s'essaieront à imaginer des "mondes meilleurs" : Thomas Campanella (La Cité du soleil, en ), Francis Beacon (La Nouvelle Atlantide, 1623), James Harrington (La République d'Océana, 1656), Dyonisius de Vairas d'Alais (Histoire des Sévarambes,1677), Morelly (Naufrage des îles flottantes ou Basiliade du célèbre Pilpaï, 1753), Etienne Cabet (Voyage et aventures de Lord Carisdall en Icarie, 1840), Eduard Bellamy (Cent ans après, ou l'an en , en ), William Morris (Nouvelles de nulle part, 1891), George Orwell (en ,en ) sont les plus célèbres, mais il y en eut bien d'autres.

Aujourd'hui, il est communément admis qu'une utopie est un rêve illusoire qui ne tient pas compte des contraintes imposées par la réalité. Le terme peut être employé à bon comme à mauvais escient : il est clair que pour ceux qui ont un intérêt au maintien de l'ordre social actuel, tout projet, pensée ou action, susceptibles de remettre en cause leur position sociale, privilèges et intérêts économiques, auront tendance à qualifier de rêveurs, au mieux sympathiques, au pire dangereux, ceux qui aspirent à un changement. Ne doutons pas que c'est ainsi que furent considérés ceux qui, avant la prise de la Bastille ou le renversement du dernier tsar, voulaient mettre fin au servage, aux privilèges féodaux et à l'emprise de la religion, ou encore ceux qui, avant la chute du Mur de Berlin, rêvaient de se débarrasser du goulag et de la dictature du parti unique. Le "dangereux" Thomas More, rappelons-le, fut décapité en 1535 par Henri 8.